À la découverte des arbres
du parc Westmount
Quelques anecdotes fascinantes qui se cachent derrière les arbres magnifiques du parc
Par Michael Walsh
Précédemment publié dans WestmountMag.ca
Beaucoup de gens aiment se promener dans le parc Westmount pour admirer la variété de superbes arbres matures, mais sans connaître leurs noms et leurs origines. Faisons une promenade dans le parc pour les identifier et découvrir l’histoire derrière ces arbres magnifiques. En effet, apprécier la vraie beauté de ces arbres dans le parc Westmount démontre que certaines choses que nous considérons comme banales sont vraiment exotiques !
L’épicéa de Brewer du parc Westmount
Une épinette solitaire assez remarquable pousse dans le parc Westmount près de la partie ouest de la lagune. On peut facilement l’identifier grâce à ses aiguilles courtes et pointues qui ne sont pas plates en apparence. Il s’agit plus précisément d’un épicea de Brewer (Picea breweriana), également connu sous le nom d’épinette pleureuse, un nom qui décrit ses belles branches tombantes caractéristiques. Il a été découvert par William Henry Brewer de l’Université de Yale à la fin des années 1800.
L’épicéa de Brewer est considéré comme l’un des plus beaux conifères au monde. En fait, c’est aussi l’un des épicéas les plus rares, et cette rareté a une histoire intéressante.
L’espèce a prospéré dans les forêts de l’Arctique tertiaire qui s’étendaient de la côte sud-ouest de l’Amérique du Nord jusqu’aux régions arctiques. Cette forêt massive a commencé à reculer lorsque des mouvements de plaques tectoniques et une activité volcanique se sont produits au Pliocène (il y a 10 millions d’années), formant la chaîne de montagnes Sierra Nevada et Cascade. Un nouveau recul de la forêt s’est produit au Pléistocène (il y a 1 million d’années), lorsque les calottes glaciaires ont recouvert la majeure partie de l’Amérique du Nord.
Une zone, cependant, n’a pas été affectée par ces changements géologiques et climatiques massifs : les montagnes de Siskiyou, dans l’actuelle région de Klamath-Siskiyou, qui chevauche aujourd’hui la frontière entre la Californie et l’Oregon. C’est dans cette région protégée que subsistent encore aujourd’hui l’épicéa de Brewer et trente autres espèces de conifères que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans le monde.
L’épicéa de Brewer est considéré comme l’un des plus beaux conifères au monde.
La prochaine fois que vous passerez près de cet arbre, pensez à la longévité qu’il représente et à la façon dont il est actuellement mesuré en termes humains. La meilleure description que j’ai trouvée est celle de Rachel Sussman, qui le décrit ainsi dans son livre The Oldest Living Things in the World :
« L’un des principaux objectifs de cet ouvrage était d’arriver à une compréhension de la superficialité de la mesure du temps humain et de la brièveté de la vie humaine. Notre compréhension du temps doit-elle être liée à notre expérience physiologique du temps ? Je ne le pense pas. Le temps est aussi profond que les eaux profondes, et nous sommes constamment ramenés à la surface, tirés par les désirs et les besoins du moment. »
Le pin gris du parc Westmount
L’un des films préférés pendant la période des fêtes est Le Noël de Charlie Brown. Bien que produit en 1965, il a résisté à l’épreuve du temps et est devenu un classique. Dans une scène, Charlie Brown accroche une seule décoration en verre au sapin de Noël qu’il a ramené à la maison, ce qui le fait plier. Il remarque : « Je l’ai tué. Oh ! Tout ce que je touche est gâché. »
Je me suis souvent demandé si le parc de Westmount contenait un pin semblable. Comme par hasard, au cours de mes nombreuses promenades dans le parc, j’ai remarqué un pin qui ressemble beaucoup à celui du film. Avec sa forme haute et effilée, il peut facilement passer inaperçu dans son emplacement près de la lagune, au sud des courts de tennis en terre battue.
Cet arbre est un pin gris (Pinus banksiana), communément nommé cyprès, bien qu’il n’appartienne pas à la famille des vrais cyprès. Il est intéressant de noter que son nom scientifique rend hommage à Sir Joseph Banks, le naturaliste britannique qui a également organisé l’expédition du capitaine William Bligh à Tahiti sur le HMS Bounty, un voyage qui s’est terminé par une mutinerie.
Le pin gris est originaire des États du nord-est et de tout le Canada, sa latitude nord s’étendant plus loin que celle de tout autre pin américain.
Il se reconnaît facilement à ses longues aiguilles en faisceaux de deux et à sa forme unique due à une torsion de la base à la pointe. En outre, il s’agit de la seule espèce de pin dont les cônes sont tordus à leur extrémité. Ces cônes peuvent rester fermés pendant de nombreuses années. En principe, les incendies de forêt entraînent l’ouverture des cônes et la distribution des graines sur le lit de cendres.
‘Le pin gris est originaire des États du nord-est et de tout le Canada, sa latitude nord s’étendant plus loin que celle de tout autre pin américain.’
La prochaine fois que vous passerez devant ce pin solitaire, rappelez-vous la description de Linus Van Pelt : « Je n’ai jamais pensé que c’était un pauvre petit arbre. Il n’est pas mal du tout, vraiment. Il a peut-être juste besoin d’un peu d’amour. »
Les épicéas de Norvège du parc Westmount
Il faut admettre que le parc Westmount connait un déploiement spectaculaire de couleurs automnales. Durant la saison hivernale, la plupart d’entre nous éprouvent un sentiment de privation de couleurs à l’extérieur. C’est pourquoi nous sommes de plus en plus conscients des différents conifères qui ornent le parc.
Par exemple, vous êtes-vous déjà demandé si le conifère que vous regardez est un pin, un épicéa ou un sapin ? Il existe un moyen simple de différencier ces trois familles. (Bien sûr, il y a toujours des exceptions). Les pins ont des aiguilles longues et fines disposées en faisceaux de deux à cinq. Chez les épicéas, les aiguilles sont courtes, pointues et à quatre côtés. Les sapins ont des aiguilles courtes, émoussées et plates, attachées aux rameaux par de courtes tiges.
Il y a un beau peuplement d’épicéas de Norvège (Picea abies) à côté du belvédère du parc. Cette espèce est très utilisée en Europe pour les décorations de Noël. En regardant de près, on peut dire qu’il s’agit d’un épicéa grâce à ses aiguilles simples, pointues et à quatre côtés. Le type d’épicéa est simple à identifier : Les épicéas de Norvège sont uniques en ce sens que leurs cônes sont orientés vers le bas et que leurs branches s’inclinent vers le sol, ce qui permet à l’arbre de se débarrasser de la neige en période hivernale. Bien qu’ils soient considérés comme des arbres à feuilles persistantes, les aiguilles finissent par tomber, même si cela peut se produire une fois tous les 10 ans.
Dans les années 1800, on recueillait la résine de ces arbres pour fabriquer de la gomme d’épinette. Cette gomme était largement vendue comme un chewing-gum de longue durée, avec un goût boisé et de couleur violacée. Les enfants vivant à la campagne obtenaient leur gomme directement de la résine durcie sur le tronc de l’arbre. Une fois recueillie, la résine est bouillie et laissée refroidir avant d’être brisée en petits morceaux et saupoudrée de fécule de maïs.
En outre, les branches et les aiguilles de l’arbre, lorsqu’elles sont bouillies avec de l’eau et de la mélasse, constituent la base d’une excellente bière d’épinette.
‘… le plus vieil arbre connu au monde est un épicéa de Norvège situé dans la province montagneuse de Dalarna, dans le centre de la Suède. Son système racinaire a poussé pendant 9 550 ans !’
Fait intéressant, les épicéas de Norvège possèdent la capacité de régénérer leurs troncs. Plus précisément, le tronc de cet arbre peut avoir une durée de vie allant jusqu’à 600 ans, mais lorsqu’il finit par mourir, un nouveau tronc est propagé à partir des racines. En fait, le plus vieil arbre connu au monde est un épicéa de Norvège situé dans la province montagneuse de Dalarna, dans le centre de la Suède. Son système racinaire a poussé pendant 9 550 ans !
Les catalpas du parc Westmount
Quand j’étais petit, l’un de mes premiers livres était la série Dick et Jane. Une histoire en particulier décrivait un cottage couvert de capucines rouges et orange aux couleurs si vives que les villageois ont appelé les pompiers en pensant qu’il y avait un incendie !
Le parc Westmount serait l’endroit idéal pour la suite de cette série – j’ai remarqué que de nombreuses personnes s’arrêtaient avec fascination devant ce qui ressemblait à un couvert de neige, en plein mois de juin, recouvrant les pelouses du parc et certaines parties de la lagune. En fait, il s’agit des fleurs blanches des catalpas du parc (Catalpa speciosa), des arbres qui se distinguent par leurs grandes feuilles en forme de cœur. (Le Catalpa bignonioides a des feuilles qui, lorsqu’elles sont meurtries, dégagent une odeur désagréable).
En examinant de près une fleur, on est stupéfait de sa beauté. Chaque fleur ressemble à une orchidée blanche aux bords ébouriffés. L’intérieur est tapissé de points violets et marrons ainsi que de lignes entrecoupées de stries jaunes.
Le mot Catalpa (une mauvaise orthographe de Catawba) provient des terres ancestrales des Indiens Catawba le long de la rivière Catawba en Caroline du Nord. Les arbres sont originaires de l’ouest de la Géorgie, de l’ouest de la Floride, de l’Alabama et de l’est du Mississippi. L’arbre a été décrit pour la première fois par Mark Catesby en 1726 lors d’une expédition anglaise visant à documenter la flore et la faune du Nouveau Monde.
Les arbres fleurissent de mi-juin à fin juin avec de grandes grappes de fleurs. Chaque grappe contient un total de vingt-sept fleurs provenant d’une tige commune (inflorescence). Chaque inflorescence fleurit pendant 5 à 6 jours. L’arbre entier fleurit pendant 8 à 12 jours.
‘Les pêcheurs ont prisé l’arbre comme source de vers depuis 140 ans. Plus précisément, la larve du sphinx ne se nourrit que des feuilles du Catalpa et est appréciée comme appât pour les poissons.’
Il est intéressant de noter que les stigmates de la fleur (surfaces réceptives au pollen) sont sensibles au mouvement. S’ils sont dérangés et qu’aucun pollen n’est déposé, les lobes de la fleur se ferment en une minute et se rouvrent cinq minutes plus tard. En revanche, si du pollen est déposé, les lobes se ferment définitivement. Les fleurs se transforment en fruits ressemblant à de longues gousses de haricot remplies de graines qui restent sur l’arbre pendant tout l’hiver.
Les pêcheurs ont prisé l’arbre comme source de vers depuis 140 ans. Plus précisément, la larve du sphinx ne se nourrit que des feuilles du Catalpa et est appréciée comme appât pour les poissons.
Les fleurs de pommiers sauvages du parc Westmount
Avez-vous déjà assisté à l’arrivée des pommiers en fleurs au parc Westmount ? Dans le monde entier, l’arrivée du printemps est annoncée par les couleurs éclatantes des arbres en fleurs.
Dans le parc Hirosaki de l’île d’Honshui au Japon, des millions de sakura (cerisiers en fleurs) fleurissent au début du printemps. À Washington, le réchauffement des températures marque la floraison de milliers de Yoshino (cerisiers) offerts en cadeau d’amitié par le Japon en 1912.
Westmount ne peut rivaliser avec ces endroits, mais à notre manière, nous avons droit à un déploiement spectaculaire de milliers de fleurs de pommiers sauvages (Malus coronaria) du parc qui nous font tourner la tête, même si cela ne dure que deux petites semaines. Pendant cette période, le parc s’embrase de fleurs blanches et rosées qui remplissent l’air d’un magnifique parfum sucré.
Les pommiers sauvages proviennent de Grande-Bretagne (introduits à l’origine par les Romains) et sont les ancêtres des pommiers cultivés d’aujourd’hui. Le nom de l’arbre en anglais, « crab apple », provient du mot norrois « skrab », qui signifie « broussailleux ».
Le chemin qui mène des anciens pommiers sauvages aux cultivars de pommiers domestiques d’aujourd’hui est une histoire fascinante qui commence avec les anciennes routes de la soie – d’anciennes routes commerciales allant de la région caspienne (mer Noire) à la Chine occidentale – établies au néolithique (10 000 ans avant J.-C.).
Les animaux de bât des convois disséminaient les graines des fruits ingérés le long de la route, provoquant le développement de nouveaux hybrides à partir d’espèces précédemment isolées. L’invention des techniques de greffage (par les Perses ou les Chinois), utilisées par les Grecs, a permis de créer de nouveaux cultivars de pommes, décrits dans les travaux botaniques de Théophraste (vers 300 avant J.-C.).
Les Romains ont apporté des cultivars de pommes en Grande-Bretagne où ils ont prospéré et se sont hybridés entre eux, à tel point qu’au XIXe siècle, chaque ville et village du centre et du sud de l’Angleterre pouvait revendiquer une pomme locale.
‘Le chemin qui mène des anciens pommiers sauvages aux cultivars de pommiers domestiques d’aujourd’hui est une histoire fascinante qui commence avec les anciennes routes de la soie.’
Les pommes ont été introduites en Amérique du Nord par les colons au XVIe siècle sous forme de graines (la greffe était rarement pratiquée). En fait, des vergers entiers de pommiers ont été créés à partir de graines (pépins) qui ont permis l’hybridation avec des pommiers locaux pour produire de nouvelles espèces de cultivars dans un mode décrit comme une vaste station expérimentale.
Les pins rouges et les taillis du parc Westmount
J’ai toujours été intrigué par le conifère, situé à côté du belvédère du parc Westmount, qui possède quatre troncs. Les aiguilles longues et fines de l’arbre (attachées en faisceaux) en font un pin. On peut reconnaître un pin rouge (Pinus resinosa) à son écorce brun rougeâtre en plaques semblables à celles d’une armure, à ses aiguilles attachées par paquets de deux et, fait intéressant, à sa capacité à se briser si on l’enroule autour d’un doigt ! L’espèce est communément appelée pin résineux ou pin de Norvège, bien qu’originaire d’Amérique du Nord, elle n’a jamais poussé en Norvège.
Les quatre troncs sont une anecdote intéressante. C’est ce qu’on appelle communément le taillis. Il s’agit de la capacité d’un arbre, s’il est endommagé, à se régénérer à partir d’une souche. On ne peut que supposer que le pin rouge du parc a perdu son tronc principal à la suite d’intempéries ou de dégâts causés par des insectes (l’écorce épaisse résiste aux feux de surface d’intensité modérée).
Le taillis peut produire une source de bois renouvelable durant des centaines d’années et, dans le passé, était une forme durable de production de bois. En fait, en Grande-Bretagne, les arbres les plus anciens sont des taillis qui datent de plus de 1 000 ans. Cette forme de production de bois d’œuvre remonte à l’ère néolithique (l’âge de pierre), comme en témoignent les anciennes pistes en bois, issues d’arbres en taillis, qui traversent les landes tourbeuses des Somerset Levels, en Angleterre.
Le long de la côte anatolienne de la Turquie actuelle, un miel est produit à partir de pins rouges. Un insecte spécifique (Marcheliana hellenica) s’enfonce sous l’écorce, dissimulé dans des sécrétions blanchâtres, et produit un miellat sucré de couleur rosée qui est recueilli par les abeilles.
Les Amérindiens (en particulier les Ojibwés) utilisaient les aiguilles des arbres pour fabriquer des figurines de danse. Les aiguilles étaient coupées pour former une robe et des bras, puis placées sur une feuille d’écorce de bouleau qui, lorsqu’elle était inclinée, donnait l’impression que les personnages dansaient.
‘L’espèce est communément appelée pin résineux ou pin de Norvège, bien qu’originaire d’Amérique du Nord.’
Enfin, la vénération que les Amérindiens vouaient aux pins se reflète dans la poignante légende Haudenosaunee (Iroquois) qui raconte l’histoire de sept frères danseurs qui, un jour, se sont élevés de la terre pour devenir des étoiles. L’un des frères regarda en arrière et vit leur mère en train de pleurer – ce faisant, il retomba sur terre. À l’endroit où il est tombé au sol, un pin imposant a poussé, indiquant l’emplacement des autres frères dans le ciel.
Image d’entête : Peuplement de sapins blancs et de pommettes près de la bibliothèque de Westmount, par Patricia Dumais
Autres images : Michael Walsh
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