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Bill Morneau présente
son budget fédéral 2018

Promouvoir égalité et croissance pour une forte classe moyenne

Par Jean-Luc Burlone

Invité par le CORIM pour présenter le budget fédéral 2018, l’honorable William Morneau a souligné l’engagement de son gouvernement pour l’égalité des genres et la classe moyenne.

S’appuyant sur une forte performance économique, le Budget Fédéral 2018 est un budget social plutôt qu’économique; il remplace à court terme les investissements dans les infrastructures par des dépenses supplémentaires afin de favoriser les femmes et l’entrepreneuriat, le régime de retraite des vétérans, la situation des autochtones, l’innovation et la recherche industrielle.

Les déficits projetés restent à la hauteur de $19.4G en 2017-18 et à $18.1G en 2018-19 pour un total de $98G au cours des six prochaines années mais sans plan pour atteindre l’équilibre budgétaire.

S’appuyant sur une forte performance économique, le Budget Fédéral 2018 est un budget social plutôt qu’économique…

Beaucoup d’économistes ont rappelé au ministre que la prudence fiscale veut que l’on profite d’une économie en pleine croissance pour équilibrer le budget et bâtir des réserves fiscales afin de gérer l’inévitable ralentissement économique qui s’en suivra.

Quant au milieu des affaires, inquiet des envolées de Donald Trump contre les échanges internationaux, il demande une réponse canadienne face aux menaces visant l’ALENA et aux tarifs imposés aux exportations vers les États-Unis.

Inébranlable, M. Morneau a rappelé à l’interviewer, Pierre-Yves McSween, que le Canada a une économie des plus performantes du monde et que la distribution de la richesse, pour favoriser l’égalité des genres et la classe moyenne, contribuera à soutenir la croissance économique.

Le Canada a une économie des plus performantes du monde et que la distribution de la richesse, pour favoriser l’égalité des genres et la classe moyenne, contribuera à soutenir la croissance économique.

De plus, le ministre y a souligné l’importance d’une analyse minutieuse des politiques américaines avant d’y réagir. Il a aussi rappelé à son auditoire que le fardeau fiscal canadien pour la grande entreprise est d’un maigre 1% plus élevé que le taux américain alors que le taux de taxation canadien pour la petite entreprise est nettement plus avantageux que le taux américain.

En fait, le budget n’entame pas l’avantage canadien mais deux mesures fiscales ajoutent une complexité peu appréciée à la fiscalité des entreprises. Le revenu de placement passif et le partage de revenu sont brièvement revus ci-dessous.

CORIM Bill Morneau and Pierre-Yves McSween - WestmountMag.ca

Deux nouvelles mesures fiscales pour les entreprises

La proposition originale d’imposer le revenu d’un placement passif détenu au sein de sociétés canadiennes privées a été atténuée. Elle demeure néanmoins une mesure fiscale qui peut s’avérer couteuse en temps et en argent.

Le premier 500 000$ du revenu d’affaires d’une entreprise est imposé à un taux préférentiel par rapport à un revenu personnel et ce, afin d’encourager un réinvestissement direct dans la société. Cependant, le taux réduit fourni également la possibilité de reporter l’impôt quand le revenu d’affaires après impôts est investi dans des placements passifs plutôt que réinvestit dans l’entreprise ou distribué comme dividende aux actionnaires. Le budget répond avec deux mesures.

‘… deux mesures fiscales ajoutent une complexité peu appréciée à la fiscalité des entreprises. Le revenu de placement passif et le partage de revenu…’

D’une part, le budget réduira le premier 500 000$ de revenu d’affaires, éligible au taux préférentiel, de 5$ pour chaque 1$ de revenu de placements passifs au delà du seuil de 50 000$. Ainsi, un revenu de 150 000$ ou plus éliminera le revenu d’affaires éligible au taux préférentiel.

Cette mesure vise principalement les activités professionnelles incorporées (comme les docteurs, comptables et avocats) qui n’ont pas besoin de réinvestissements significatifs dans leur entreprise et qui pourraient investir des sommes substantielles dans des placements passifs. Pour ces entreprises, un revenu de placements passifs de 150 000 $ ou plus, augmenterait leur taux d’imposition de 17%-20,6% à 26,6% en 2019. (Dominic Leduc, CPA, CA, D.Fisc)

‘Le budget répond avec deux mesures. D’une part, le budget réduira le premier 500 000$ de revenu d’affaires, éligible au taux préférentiel, de 5$ pour chaque 1$ de revenu de placements passifs au delà du seuil de 50 000$.’

D’autre part, le revenu de placements passifs de l’entreprise est normalement distribué aux actionnaires comme un dividende non éligible et imposé à haut taux. Une partie de l’impôt payé par l’entreprise lui est remboursée quand elle distribue des dividendes à ses actionnaires. Plus précisément, le remboursement se fait par le compte de l’impôt en main remboursable au titre de dividende (IMRTD).

Le remboursement de l’IMRTD ne différencie pas les dividendes non éligibles (qui proviennent de placements passifs et du revenu d’affaires imposé au taux préférentiel) et les dividendes éligibles (qui proviennent du revenu d’affaires imposé au taux régulier).

Les dividendes non éligibles sont alors imposés à un taux personnel plus élevé que celui des dividendes éligibles. Ceci créé une occasion pour la société qui gagne un revenu de placements passifs et une revenu d’affaires imposé au taux régulier de récupérer le remboursement de l’IMRTD en distribuant un dividende éligible aux actionnaires. (Dominic Leduc, CPA, CA, D.Fisc)

‘… le budget créera deux comptes d’IMRTD : Un compte pour les dividendes éligibles et un autre IMRTD pour les dividendes non éligibles.’

En réponse, le budget créera deux comptes d’IMRTD : Un compte pour les dividendes éligibles et un autre IMRTD pour les dividendes non éligibles. Le remboursement de ce dernier sera effectué seulement dans le cas où l’entreprise versera des dividendes non éligibles.

Cette mesure s’assure simplement que le principe général, comme quoi le revenu de placements passifs doit être distribué comme un dividende non éligible, soit bien respecté. Elle affectera principalement les entreprises qui gagnent un revenu de placements passifs ainsi qu’un un revenu d’affaires au-delà de 500 000$. (Dominic Leduc, CPA, CA, D.Fisc)

Ces deux mesures fiscales, qui touchent le revenu de placements passifs, seront appliquées après 2018 et soumises aux clauses de non évitement. Par contre, la mesure visant à contenir le partage de revenu sera appliquée pour l’année 2018.

‘… le budget 2018 confirme les règles de Décembre 2017 quant au partage de revenu.’

À ce titre, le budget 2018 confirme les règles de Décembre 2017 quant au partage de revenu. Il exige, essentiellement, que tout partage de revenu entre individus reflète la contribution respective de chaque individu. Tout salaire versé, dividende distribué ou gain en capital réalisé, doit correspondre à une contribution raisonnable en temps, en travail ou en responsabilité.

La mesure donne des exceptions et des critères pour déterminer si une contribution est raisonnable. Peu de critères sont appréciés et la plupart limitent les possibilités de partage et ajoutent une complexité significative aux entrepreneurs.

NB : Il est évidemment nécessaire de vérifier les conséquences fiscales de toutes décisions avec un expert en taxe, un fiscaliste ou avocat qualifiés.

Images : Sylvie-Ann Paré

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jean-luc_burlone

Jean-Luc Burlone, Ms. Sc. Economie, FCSI (1996)
Analyse économique et Stratégie financière
jlb@jlburlone.com

Dominic Leduc, CPA, CA, D.Fisc
dominic.leduc@cpafiscaliste.ca

Fellow de l’Institut canadien des valeurs mobilières (FCSI), Jean-Luc Burlone a une excellente connaissance de la gestion des produits financiers et il détient une maîtrise en économie de l’Université de Montréal avec une double spécialisation en économie du développement et en économie internationale – finance et commerce.




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