La Conférence de Paris:
populisme et multilatéralisme
Un dialogue pour préserver ce qui est bon et corriger ce qui l’est moins
Par Jean-Luc Burlone
La Conférence de Paris, organisée par le Forum économique international des Amériques, a attiré mille deux cents participants qui sont venus des quatre continents pour écouter quatre-vingt conférenciers débattre de l’incertitude liée à une mondialisation perturbée par des politiques, des mouvements populaires et une technologie aux effets insoupçonnés.
La conférence à eu lieu à l’OCDE où les deux journées de rencontres et de discussions abordèrent les inégalités, l’endettement généralisé, la volatilité des marchés, le commerce international, l’immigration incontrôlée et le changement climatique, en considérant tant les causes que les conséquences, tant au niveau gouvernementale qu’à celui de la société civile.
… mille deux cents participants… sont venus des quatre continents pour écouter quatre-vingt conférenciers…
Au cours des discussions, le conflit entre le populisme et le multilatéralisme est ressorti comme un défi majeur à la croissance économique mondiale. À ce titre, deux pistes intéressantes ont été émises. Pour gérer la question de l’immigration, il est suggéré d’établir des politiques permanentes afin d’éviter la formation de ghettos, car ce problème n’est pas conjoncturel mais bien structurel. D’autre part, la mondialisation, de par sa nature, requière un « état de droit mondial », une vision pour rebâtir la confiance envers un multilatéralisme qui serait favorable à une distribution plus équitable de la richesse.
Un avertissement sévère a été donné pour pallier la vision à court terme du capitalisme – « ne pas attendre que le pire se réalise pour agir » – car, comme le réchauffement climatique, les politiques populistes ont des conséquences dramatiques pour les populations. Le cas actuel du Vénézuela est probant. L’Europe elle-même, malgré sa richesse, est devenue une proie qui se débat dans un nouveau contexte géopolitique où elle ne pèse guère.
Un avertissement aussi quant à l’impact, peu considéré jusqu’à maintenant, de la technologie sur l’être humain et son cerveau. On ignore toujours l’ampleur de ses effets sur l’individu et ses valeurs. Les valeurs morales sont perturbées et on accepte sans référence de les relativiser. Une réponse à cette influence serait de promouvoir l’engagement civil afin de promouvoir et de préserver nos valeurs sociales. Quant à règlementer la technologie, elle réagit aux évènements du marché; seule l’Europe protège les usagers des média sociaux alors que les États-Unis enquête sur ces média et que la Chine les utilise à ses fins politiques.
‘… le conflit entre le populisme et le multilatéralisme est ressorti comme un défi majeur à la croissance économique mondiale.’
L’éducation a été fortement primée par plusieurs conférenciers afin d’informer davantage les jeunes aux tenants et aboutissements de la technologie, et les préparer à un avenir en bonne partie imprévisible. La compréhension du langage numérique est maintenant un atout. De même, la justesse de disséminer les avantages que la diversité représente comme facteur positif pour les entreprises; il est reconnu que d’intégrer les ethnies, les genres, l’âge et les valeurs favorise la communication avec les clients et les échanges internationaux.
Les conférenciers ont insisté sur l’agilité comme caractéristique importante, voire essentielle, pour le succès des entreprises. La capacité de modifier rapidement la production d’un produit ou l’offre d’un service, comme leur marketing, permet de s’adapter rapidement aux changements de la demande, une capacité indispensable au succès. Les changements qui marquent le domaine financier en sont un exemple.
L’agilité des entreprises émergentes perturbe le secteur financier depuis quelques années. Elles offrent aux clients les produits financiers conventionnels (assurance, placements) à toutes heures. En fait, elles vendent la possibilité de faire vos affaires au moment opportun pour vous et non pas selon l’horaire d’un fournisseur.
Un tuyau pour les entreprises qui doivent se restructurer; il faut donner un signal clair et fort qui indique pourquoi et comment on planifie la restructuration. De plus, il faut que cette restructuration se réalise à 50% dès la première année, 30% la deuxième et 20% la troisième et dernière année. C’est la répartition la plus efficace pour réussir.
‘Dès la première présentation, la question de la perturbation du commerce international a été soulevée car elle est positivement corrélée à la croissance économique.’
Dès la première présentation, la question de la perturbation du commerce international a été soulevée car elle est positivement corrélée à la croissance économique. L’imposition de tarifs réduit cette croissance alors que leur réduction a un effet inverse. (Une variation de 1 dans la croissance du commerce cause une variation de plus de 1 dans la croissance économique.) Il est inquiétant que la politique commerciale américaine ignore cette réalité. L’économie mondiale risque de perdre son momentum. Les chaines d’approvisionnement sont déjà perturbées et de nouvelles configurations – réinventées et adaptées au contexte actuel – se feront probablement au détriment de l’Amérique.
Le leadership, bien qu’important, est absent dans bien des secteurs. La définition de David Foster Wallace résume ce qui a été dit : “A real leader is somebody who can help us overcome the limitations of our own individual laziness and selfishness and weakness and fear and get us to do better, harder things than we can get ourselves to do on our own.”
En postscriptum, un sujet brièvement mentionné : la conjoncture où la démographie, les inégalités, la main d’œuvre et la robotisation convergent dans le temps et forceront une adaptation possiblement brutale. Ce sujet mérite d’être approfondi avant d’être résumé.
Images : Conférence de Paris – Forum économique international des Amériques
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Jean-Luc Burlone, Ms. Sc. Economie, FCSI (1996)
Analyse économique et Stratégie financière • jlb@jlburlone.com
Fellow de l’Institut canadien des valeurs mobilières (FCSI), Jean-Luc Burlone a une excellente connaissance de la gestion des produits financiers et il détient une maîtrise en économie de l’Université de Montréal avec une double spécialisation en économie du développement et en économie internationale – finance et commerce.
Le texte ci-dessus exprime mon opinion suite à ma participation au Forum économique international des Amériques, Conférence de Paris dont le titre est: Reshaping Globalization – Mastering Change, le 2 et 3 octobre 2018. JLB
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