Priver les enfants de leur innocence
Le fait de justifier la prise d’une vie est la première étape d’un processus de dévalorisation de la vie en général
Par Georges R. Dupras
26 janvier 2019
On pouvait lire récemment que la Duchesse de Cambridge a accompagné le jeune prince George à sa première partie de chasse aux faisans.
Voici un enfant effervescent, heureux et insouciant, innocent et aucunement au courant des enjeux compliqués de la vie. À un âge où il apprend comment se comporter en société, il est également conditionné à une façon de penser. Je fais référence ici au développement d’une mentalité. Trop souvent, au cours de ces premières années formatives, l’enfant est dépouillé de ces caractéristiques que nous admirons tellement.
Le sourire empressé et l’enthousiasme impatient dans l’attente du Père Noël la veille de Noël, ou peut-être l’anticipation de Pâques pour cette importante chasse aux œufs, sont rapidement perdus. Après tout, les enfants doivent apprendre les réalités de la vie et l’innocence du garçon doit être remplacée par l’obligation inhérente de devenir un homme.
Nous sommes tous doués, à un degré ou à un autre, que ce soit avec une intelligence supérieure à la moyenne, ou dans le domaine artistique, en athlétisme, ou pour certains, avec un instinct pour les affaires ou en débrouillardise.
Qu’est-ce que la sensibilité ? Est-ce un don ou une malédiction ? Les personnes qui sont sensibles, un trait enraciné dans la compassion, peuvent difficilement trouver le bonheur, et certainement pas dans le monde actuel. Pensons aux enfants qui ont perdu leur innocence et qui ont été désensibilisés à travers un conditionnement.
Le fait d’exposer un enfant à une tuerie dans le cadre d’une activité qui tolère la violence, et surtout durant laquelle les participants prennent plaisir à tuer, n’est qu’un abus de mineur.
Je suis d’avis d’ailleurs, comme d’autres, qu’il y a trois éléments que l’on doit toujours respecter chez l’humain, la dignité, la foi, et la sensibilité, car ils sont l’essence même de la personne.
La vie est pleine de difficultés, et le désillusionnement arrive assez vite. Il n’y a aucune raison valable d’introduire les réalités de notre monde à un jeune esprit libre avant qu’il n’ait acquis la compréhension pour poser des questions et contester les raisons données. Qui sommes-nous ? Quel est notre rôle ? Comprendre ce qui nous définit en tant qu’individu constitue le travail d’une vie entière. Et nous n’aurons peut-être jamais la réponse. Le fait d’exposer un enfant à une tuerie dans le cadre d’une activité qui tolère la violence, et surtout durant laquelle les participants prennent plaisir à tuer, n’est qu’un abus de mineur. Le fait de justifier la prise d’une vie, qu’elle soit humaine ou animale, est la première étape d’un processus de dévalorisation de la vie en général.
La maltraitance prend plusieurs formes : l’abus physique, la négligence, l’abus émotionnel ou par conditionnement. Le fait de désensibiliser un enfant en l’exposant à la violence, et surtout au plaisir que certaines personnes prennent à travers la violence et la tuerie, est honteux.
Les raisons
Les faisans ne sont pas originaires du Royaume-Uni. Ils ont été importés comme nourriture et comme espèces de gibier par des enthousiastes de la chasse. Leur nombre augmente, mais ceci est le résultat d’une planification délibérée. Ce sont les mêmes mentalités qui font la chasse aux sangliers dans des enclos fermés en France, et qui se disent écologistes et défenseurs de l’environnement.
‘Maintenant on nous dit anti riches. Est-ce possible que nous soyons tout simplement anti cruauté ?’
Des passe-temps dit traditionnels sont souvent utilisés pour justifier des pratiques qui ne sont plus acceptables et qui ne font plus partie de nos valeurs sociales. Si nous aimons nos traditions, il nous incombe de repenser, de réinventer, ou de discontinuer celles qui sont sujet à controverse. Au cours des années, ceux qui ont exprimé leurs préoccupations concernant le trappage, les rodéos, les cirques, les combats de taureaux, les pratiques d’abatage, incluant l’abatage Kosher et Halal, ont été accusé d’être anti indigènes, anti pauvres, anti sémites, anti musulmans. Maintenant on nous dit anti riches. Est-ce possible que nous soyons tout simplement anti cruauté ?
Quelle tristesse de penser qu’en 2019, certaines personnes prennent encore grand plaisir à enlever des vies, à tuer, à dévaluer la vie, et pire encore, à priver les enfants de leur innocence.
Image : California Department of Fish and Wildlife via StockPholio.net
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Georges R. Dupras se fait le champion et le défenseur des animaux depuis plus de 50 ans. Il est membre de l’International Association for Bear Research and Management (IBA) et un ancien directeur de la Société canadienne pour la prévention de la cruauté envers les animaux (CSPCA). En 1966, il s’est impliqué dans la campagne initiale pour sauver les phoques qui a mené à la fondation de l’International Fund for Animal Welfare (IFAW) en 1969. Il a publié deux livres : Values in Conflict et Ethics, A Human Condition. Georges demeure à Montréal, Québec, Canada.
Les enfants aiment et font confiance à leurs parents et comptent sur leur jugement jusqu’à ce qu’ils soient assez vieux pour penser par eux-mêmes. De nombreuses familles considèrent la chasse et le piégeage une activité normale, car elles les pratiquent depuis des générations. Dans le passé, la chasse et le piégeage avaient un objectif de survie, mais ce n’est plus le cas. Ceux qui exercent cette activité le font uniquement à des fins de divertissement et cela devrait être remis en question. La duchesse de Cambridge m’impressionnerait beaucoup plus si elle emmenait Prince George observer les oiseaux au lieu de tirer sur des faisans.