Le projet de loi C-156 :
la conséquence du déni
Une atteinte à la liberté d’expression et au signalement de la cruauté envers les animaux
Par Georges R. Dupras
Je ne peux m’empêcher de me demander qui a eu l’idée du Projet de loi C-156 en Ontario. Ce projet de loi enlèverait au public et à la presse la possibilité d’enfreindre, de documenter ou de signaler toute cruauté envers les animaux.
Je pense que cette attaque flagrante contre la liberté d’expression et de parole est le résultat d’un cas où une femme, décrite comme une terroriste par l’industrie animale, a été arrêtée pour avoir donné de l’eau à un cochon en route vers l’abattoir. Des accusations ont été portées, mais les conséquences n’ont pas été celles que l’industrie espérait. Il semble que lorsque le grand public a été informé que les porcs peuvent voyager jusqu’à 36 heures sans repos ni eau, il se soit rangé du côté de l’accusée.
Nombre de ces témoignages proviennent de dénonciateurs, qui ont une connaissance de première main de ce qui se passe derrière des portes closes, tandis que d’autres proviennent d’agents infiltrés.
Il existe de nombreux exemples d’abus au sein des industries qui exploitent les animaux; des abus documentés par diverses organisations à travers l’Amérique du Nord. Lorsque ces incidents sont rendus publics, l’industrie réagit soit en insistant sur le fait qu’il s’agit de cas isolés, soit en refusant de les reconnaître. En vérité, il ne se passe guère de mois sans que des événements, des vidéos et des images horribles provenant de toute l’Amérique du Nord ne soient portés à notre attention. Ces abus ne se limitent pas seulement à l’industrie agricole, mais également à l’industrie du divertissement et à d’autres secteurs. Nombre de ces témoignages proviennent de dénonciateurs, qui ont une connaissance de première main de ce qui se passe derrière des portes closes, tandis que d’autres proviennent d’agents infiltrés.
Le déni
Plutôt que de faire face à la réalité, les industries animales continuent de fonctionner à huis clos tout en engageant des sociétés de relations publiques pour redorer leur image chancelante. Entre autres changements cosmétiques, elles n’utilisent plus le terme “abattoirs” mais promeuvent l’expression “producteurs de protéines”. Ces mêmes industries qualifient également de “terroristes” toute personne critiquant leurs méthodes, bien qu’on pourrait penser que cette étiquette conviendrait mieux aux responsables de l’attaque du 11 septembre, de l’attentat d’Oklahoma, de la catastrophe aérienne de Lockerby et des attentats à la bombe dans les ambassades. Il est vrai que certains des groupes les plus actifs au sein des groupes de défense des animaux qualifient les producteurs de viande d’égorgeurs, mais n’est-ce pas exactement ce qu’ils font derrière ces portes closes ?
‘Plutôt que de faire face à la réalité, les industries animales continuent de fonctionner à huis clos tout en engageant des sociétés de relations publiques pour redorer leur image chancelante.’
Les industries animales maintiennent qu’elles se conforment aux normes de l’industrie à chaque étape du processus d’abattage. Lors d’un témoignage devant le Comité du Sénat sur la loi C-156, le 8 juin 2020, un conférencier représentant l’industrie de l’alimentation a laissé entendre qu’un vétérinaire était toujours présent, incluant lors de la mort de l’animal. Cette affirmation a été démentie par au moins deux vétérinaires, dont un ancien agent d’inspection alimentaire canadienà la retraite.
De plus, l’industrie de l’alimentation peut compter sur l’appui des deux principaux partis fédéraux, libéral et conservateur, qui ferment les yeux sur l’existence de groupes clandestins de députés et de sénateurs non élus ayant comme mandat de saboter toute législation qui assurerait davantage une protection adéquate aux animaux. Du côté libéral, le Comité électoral rural, et du côté conservateur, le Comité électoral extérieur.
Les défenseurs des animaux devraient être reconnaissants au gouvernement du premier ministre de l’Ontario, car ils bénéficieront maintenant d’une publicité gratuite à l’échelle internationale qu’ils n’auraient jamais pu se payer et qui leur permettra de promouvoir leur point de vue lorsque la loi C-156 sera contestée devant la Cour suprême.
Les inspecteurs
On nous assure que l’industrie de l’alimentation est supervisée par l’Agence canadienne d’inspection des aliments, afin de garantir le respect de toutes les règlementations de l’industrie.
N’est-ce pas précisément ce que les autorités provinciales nous disaient à propos des CHSLD avant même la pandémie ? On nous assurait que ces résidences étaient entre bonnes mains et sous la surveillance d’agents et d’inspecteurs responsables. Notre expérience avec la COVID-19 ne nous a-t-elle pas appris que les résidences pour personnes âgées ont été les plus touchées par le Coronavirus et que la situation s’est détériorée durant des jours avant que quiconque ne soit au courant ? La pandémie a été un signal d’alarme. Ces centres hospitaliers de soins de longue durée sont devenus les épicentres de la pandémie due à une mauvaise gestion, la négligence et au manque de personnel.
‘Lors d’un témoignage devant le Comité du Sénat, un conférencier représentant l’industrie de l’alimentation a laissé entendre qu’un vétérinaire était toujours présent, incluant lors de la mort de l’animal. Cette affirmation a été démentie par au moins deux vétérinaires, dont un ancien agent d’inspection alimentaire canadien à la retraite.’
Où étaient les inspecteurs ? Où étaient les agents responsables de ces établissements ? N’oublions pas que ces CHSLD sont ouverts au public, contrairement aux abattoirs qui sont fermés au droit de regard du public, et que ce n’était pas non plus la première pandémie. En 2004, lors de l’épidémie du SRAS, on nous a assuré que des mesures de sécurité seraient dorénavant mises en place afin de mieux prévenir et réagir à de tels événements à l’avenir. C’était il y a 16 ans, et lorsque le Coronavirus a été identifié il y a quelques mois, où étaient ces mesures préventives ?
Je ne blâme pas les quelques inspecteurs en place, car ils sont trop peu nombreux et ils doivent signaler toutes les infractions aux patrons et à l’industrie.
Peut-on blâmer le public ?
Le coronavirus est peut-être originaire de Wuhan, en Chine, mais les ravages de cette maladie ont décimé les centres pour personnes âgées ici au Canada, et ces résidences sont ouvertes au public. Peut-on nous reprocher notre manque de confiance envers un système autoréglementé, géré à huis clos, et sans surveillance indépendante ? C’est exactement ce qui se passe chaque jour dans les abattoirs de ce pays.
La liberté d’expression
Ce qui est menacé ici est notre droit fondamental à la liberté d’expression. Chaque canadien a le droit de savoir d’où provient sa nourriture, si elle est génétiquement modifiée et comment elle est transformée.
« Je suis peut-être en désaccord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous ayez le droit de le dire. » Ce dicton ne s’applique évidemment pas au Canada.
Signez la petition
Pour en savoir plus sur le projet de loi C-156 et pour signer la pétition visiter stopbill156.com
Image d’entête : Cicatrices de chocs électriques sur un porc maltraité, dans un camion d’abattage, Burlington, Ontario – stopbill156.comÀ lire aussi : autres articles par Georges R. Dupras
Georges R. Dupras se fait le champion et le défenseur des animaux depuis plus de 50 ans. Il est membre de l’International Association for Bear Research and Management (IBA), un directeur de l’Alliance pour les animaux du Canada (AAC), le représentant du Québec de Zoocheck Canada, et un ancien directeur de la Société canadienne pour la prévention de la cruauté envers les animaux (CSPCA). En 1966, il s’est impliqué dans la campagne initiale pour sauver les phoques qui a mené à la fondation de l’International Fund for Animal Welfare (IFAW) en 1969. Il a publié deux livres : Values in Conflict et Ethics, A Human Condition. Georges demeure à Montréal, Québec, Canada.
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