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Manifeste de bienséance

Certains jouent d’un instrument de musique,
moi je joue de l’étiquette.

Par Brigitte Stock.

Cet article a été publié précédemment dans WestmountMag.ca

Je me souviens de la première fois où j’ai choisi de lire un livre sur l’étiquette. J’étais alors étudiante au collège Villa-Maria. Sur un des rayons de la bibliothèque, un livre à la couverture bleue «Le guide Marabout de la jeune fille d’aujourd’hui» attira mon regard. À côté, un autre ouvrage, plus ancien celui-là, portait sur les coutumes de bienséance d’autrefois . C’est celui que je choisis. En une journée, j’en avais fini la lecture. Le surlendemain je revins sur l’heure du midi pour emprunter un autre livre et depuis j’ai lu des centaines de livres et consulté des milliers d’articles sur le savoir-vivre et les bonnes manières. Chaque semaine j’en découvre de nouveaux et j’y prends toujours un vif plaisir.

Ainsi, bien sagement, j’appris les codes de bienséance. Comme vous pouvez l’imaginer, Villa-Maria dans les années 70 était un monde à part, protégé et magnifique. Nos enseignantes appréciaient les bonnes manières, ce qui était vraiment aux antipodes des valeurs véhiculées alors au Québec. Mais vivre dans un monde où le décorum et les convenances étaient jugées comme une forme d’hypocrisie posait quelques défis. Au risque d’être considérée comme totalement dépassée, rien ne me faisait plus plaisir que de mettre mes nouvelles connaissances au test. Comme d’autres apprenaient le violon ou le piano, moi j’apprenais la courtoisie et les bonnes manières. Pendant que certains faisaient leurs gammes, moi je jouais de l’étiquette.

Nos enseignantes appréciaient les bonnes manières, ce qui était vraiment aux antipodes des valeurs véhiculées alors au Québec.

À l’époque, mon meilleur ami à la campagne s’appelait Jacques. On s’amusait comme des fous car c’était un leader né qui nous organisait des jeux plus amusants les uns que les autres. Et surtout, il avait une qualité qui le rendait tant aimable et apprécié aux yeux de notre bande de gamins, il avait le souci des autres. Des cabanes dans le bois aux baignades dans le lac, il me faisait tellement rire quand il prononçait de sa voix qui muait le mot «marde», et moi qui le reprenais du haut de mes neuf ans «merde».

Il faut dire que mes connaissances se sont depuis raffinées. Il me ferait tant plaisir aujourd’hui d’expliquer à Jacques que les gros mots et les frustrations ne sont pas la meilleure façon de relâcher la soupape. Je lui aurais parlé du «Gentlemen’s Book of Etiquette and Manual of Politeness» de Cecil B. Hartley qui enseigne qu’un gentleman n’emploie jamais de gros mots ou ne se met en colère, au risque de choquer son entourage. Une personne bien élevée se démarque par la retenue dont elle fait preuve en public et en privé. Et même si, dans les situations les plus désagréables, nous serions tentés d’avoir un manque de retenue, la politesse commande un tact et un sens du décorum.

Il me ferait tant plaisir aujourd’hui d’expliquer à Jacques que les gros mots et les frustrations ne sont pas la meilleure façon de relâcher la soupape.

Pour expliquer le manque de civisme, caractéristique indéniable de notre société actuelle, d’aucuns s’empresseront de blâmer les médias, la musique ou toute autre raison. Je m’oppose à cette déformation de la réalité. À preuve, les formations que je donne démontrent hors de tous doutes que ce sont les jeunes et les adolescents qui manifestent le plus grand intérêt pour les notions de savoir-vivre car ils veulent apprendre les bonnes manières.

Pour cette raison, je propose que toutes les institutions d’enseignement offrent, aux jeunes qui les désirent, des cours d’étiquette et de bonnes manières actualisées à la réalité d’aujourd’hui et plaçant le respect de l’autre au cœur des échanges.

Image : Internet Archive Book Images via StockPholio.com


Brigitte Stock

Brigitte Stock, une résidente de Westmount, est une formatrice de l’étiquette et blogueuse qui dirige des ateliers de bienséance pour un large éventail de clients, allant de professionnels aux enfants. On peut consulter son blogue à etiquetteandgoodmanners.blogspot.com, ou la contacter au 514 913-3813.



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