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Un abattage d’ours absurde
dans l’ouest de l’île de Montréal

La décision d’euthanasier un jeune ours a été prise pour de mauvaises raisons

Par Georges R. Dupras

29 mai 2021

La décision prise par le Service de la faune d’euthanasier un jeune ours qui s’était égaré à Montréal le 23 mai dernier a été prise pour de mauvaises raisons.

Une erreur de jugement

On ne peut justifier cette tuerie pour raison de sécurité. Premièrement, les humains ne couraient aucun danger, car l’ours s’était réfugié en haut d’un arbre, une position défensive et non agressive pour cet animal. Deuxièmement, les autorités avaient tranquillisé l’ours, ce qui laissait le temps d’envisager d’autres options. Troisièmement, un ours d’un an et demi ou de deux ans n’a pas encore établi son territoire, ce qui facilite son transfert. Quatrièmement, des spécialistes ayant de nombreuses années d’expérience en matière de relocalisation d’ours affirment que, si l’ours est emmené suffisamment loin de la zone préoccupante, il ne reviendra probablement pas¹.

On ne peut justifier cette tuerie pour raison de sécurité… l’ours s’était réfugié en haut d’un arbre, une position défensive et non agressive pour cet animal.

Cinquièmement, bien que parfois il soit nécessaire de tuer un animal, ce n’est jamais une solution mais plutôt un aveu d’échec, et dans de nombreux cas, cela est dû à l’empiètement incessant des humains sur les habitats naturels. Il y a aussi la question de l’impact de la mise à mort des animaux sur les enfants et de leur désensibilisation. Et, bien que nous l’admettions rarement, ce manque de respect et de sensibilité envers les autres espèces vivantes nous affecte tous. Ça nous touche et ça nous influence.

La recherche translocation²

Two-year-old black bears

Ours noirs de deux ans – Image : gracieuseté de Mike McIntosh, Bear With Us

« La relocalisation d’ours noirs nuisibles n’affecte aucunement leur taux de survie². Je pense qu’il est important de reconnaître que la relocalisation peut être un outil de gestion efficace », selon Javan Bauder, qui a mené ses recherches à titre d’assistant de recherche postdoctoral dans le cadre du Illinois Natural History Survey. « Ce n’est pas parce que vous relocalisez des ours individus nuisibles qu’ils auront de faibles taux de survie ».

Les chercheurs se sont penchés sur 38 ans de données concernant 1,233 ours noirs nuisibles identifiés et relocalisés. Ces données ont été utilisées pour estimer les taux de mortalité annuels, pour des motifs liées ou non à la chasse. L’objectif de ce rapport d’enquête était d’estimer le taux de survie des ours pour les individus non relocalisés qui ne sont pas des ours nuisibles, ceux-ci faisant partie du groupe témoin. La recherche a montré que plus les ours étaient éloignés, plus le taux de survie était élevé. « Nous étions surpris par ces résultats », a dit M. Bauder, qui pensait que le fait d’éloigner les ours des sources qu’ils connaissaient aurait un impact négatif sur leur capacité de survie.

Dans le cas où le taux de survie pour les ours nuisibles déplacés de leur territoire était inférieur à celui des autre ours, les chercheurs ont découvert que cela était probablement dû à leurs comportement et non au fait qu’ils ont été déplacés. Le taux de survie des ours relocalisés était systématiquement plus faible que les ours non nuisibles non déplacés. Selon M. Bauder « Il y a un risque inhérent avec les ours nuisibles. Ils sont plus proches des humains et de leurs habitations, plus proches des routes et des risques de mortalité élevés. Ils sont également sensibles à la chasse récréative ».

‘Les spécialistes dans la relocalisation des ours affirment que si l’animal est suffisamment éloigné de la zone concernée, il ne reviendra probablement pas¹.’

« Notre étude suggère que le déplacement et la relocalisation est une méthode efficace pour atténuer les conflits entr humains et ours, et qui ne semble pas réduire le taux de survie des ours ».

Au Canada, un spécialiste des ours³ qui travaille dans ce domaine depuis des années a relocalisé des ours avec succès, incluant des ours plus âgés. Il ne voit aucune raison de penser qu’un ours âgé d’un an et demi ou deux ne puisse être transféré avec les résultats escomptés. L’astuce consiste à s’assurer que l’ours est emmené suffisamment loin de la zone concernée et que les éléments susceptibles de l’attirer sont retirés des maisons et des chalets.

Des ressources limitées et sous-financées

Les services de la faune sont largement sous-financés et, lorsque vous tenez compte des vastes régions dont chaque agent de conservation est responsable, nous comprenons le dilemme.

Il est temps de changer les mentalités

Les officiers de la faune et agents de conservation dans chaque province doivent reconnaître que leur mandat exige qu’ils répondent aux besoins et aux inquiétudes de chaque citoyen, peu importe où cette personne habite. Les problèmes liés à la faune seraient mieux gérés si chacune des provinces allouait les fonds suffisants pour permettre aux agents de conservation de régler les problèmes en temps opportun.

‘Il est temps de cesser de sacrifier la véritable conservation pour des raisons politiques (circonscriptions rurales), budgétaires et opportunistes.’

Une formation obligatoire et continue des agents de conservation est nécessaire pour minimiser les blessures et les abattages inutiles. Cette formation devrait inclure les technologies de pointe et une compréhension claire de l’évolution des valeurs sociales. Les ressources humaines doivent être sélectionnées avec soin et celles dont les antécédents et les mentalités ne se prêtent pas à ce type de spécialisation ne doivent pas être choisies.

Compte tenu de la diminution actuelle des espèces et de la destruction environnementale, il est temps de cesser de sacrifier la véritable conservation pour des raisons politiques (circonscriptions rurales), budgétaires et opportunistes.


  1. Voir le paragraphe La recherche
  2. Relocation des ours noirs nuisibles
  3. Mike McIntosh, Bear with Us

Image d’entête : Enric Cruz López de Pexels

Button Sign up to newsletter – WestmountMag.caÀ lire aussi : autres articles par Georges R. Dupras


Georges Dupras

Georges R. Dupras se fait le champion et le défenseur des animaux depuis plus de 50 ans. Il est membre de l’International Association for Bear Research and Management (IBA), un directeur de l’Alliance pour les animaux du Canada (AAC), le représentant du Québec de Zoocheck Canada, et un ancien directeur de la Société canadienne pour la prévention de la cruauté envers les animaux (CSPCA). En 1966, il s’est impliqué dans la campagne initiale pour sauver les phoques qui a mené à la fondation de l’International Fund for Animal Welfare (IFAW) en 1969. Il a publié deux livres : Values in Conflict et Ethics, A Human Condition. Georges demeure à Montréal, Québec, Canada.

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1 commentaire trouvé

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  1. Patricia Dumais

    C’est vraiment inquiétant de voir comment nous traitons la précieuse faune sauvage comme des déchets jetables. Je suis d’accord – les choses doivent changer. Pourquoi ne pas lancer une pétition à la mémoire de l’ours ?

  2. Georges Dupras

    Vous pouvez rédiger votre plainte a:

    plaintes@mffp.gouv.qc.ca

    Tel san frais: 1-855-279-9157

    Fax: 418-634-3352

    Address: Le responsable des plaintes,
    Département du sou-ministre,
    bureau du secréteria
    Ministère des Forest, Faunes et Parcs
    5700 4 ième ave. Ouest A413
    Québec (Québec) G1H 6R1


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