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Un paradigme non examiné
que nous devons changer

Nous devons coopérer, conserver et agir par altruisme si nous voulons survivre

Par Carole Reed

19 juillet 2021

Récemment, notre groupe environnemental a participé à un concours intitulé Demain, le Québec, parrainé par la Fondation David Suzuki. Les groupes environnementaux de toute la province ont été invités à soumettre des comptes rendus de leurs activités afin de se qualifier pour l’un des trois prix en espèces. Nous nous sommes inscrits dans l’idée de rehausser notre profil local, et nous avons été ravis d’être sélectionnés parmi les finalistes.

Cependant, à mesure que nous en apprenions davantage sur la façon dont le concours allait se dérouler, nous nous sommes sentis de plus en plus mal à l’aise. On nous a demandé d’inonder les médias sociaux de messages quotidiens sur notre organisation et notre travail environnemental afin de solliciter des votes. Les groupes environnementaux s’affrontaient dans un concours de popularité afin que nous puissions gagner un peu d’argent pour couvrir une partie de nos frais de fonctionnement.

J’ai été déçue par la façon dont le concours David Suzuki a été organisé jusqu’à ce que je réalise que la faute n’incombait pas tant aux organisateurs qu’à un paradigme non examiné. Et j’ai compris que, si nous voulons survivre en tant qu’espèce, nous devons changer ce paradigme.

J’ai été déçue par la façon dont le concours David Suzuki a été organisé jusqu’à ce que je réalise que la faute n’incombait pas tant aux organisateurs qu’à un paradigme non examiné.

Les trois grands paradigmes que nous avons hérités de la révolution industrielle sont que la compétition est la clé du succès, que la possession est la clé du bonheur et que l’intérêt personnel est la clé de l’amour. Mais le véritable succès est notre survie en tant qu’espèce. Si nous voulons survivre, nous devons coopérer et non faire concurrence, conserver et non consommer, et agir par altruisme et non par intérêt personnel. Nous devons nous protéger mutuellement et protéger tout ce qui partage notre planète avec nous.

Nous devons coopérer et non compétitioner

Si la concurrence peut engendrer la réussite financière et sociale, la coopération est la clé de notre survie. Toutes les espèces, des mammifères aux plus petits microbes, coopèrent pour survivre. Les mitochondries, d’anciennes bactéries qui se développent dans l’environnement sans oxygène de nos cellules, produisent du carburant pour notre corps. Les champignons mycorrhiziens entretiennent des relations symbiotiques avec les arbres. Ils dépendent des arbres pour la photosynthèse et, en retour, relient tous les arbres par un réseau complexe qui les nourrit, les protège des maladies et leur permet de communiquer entre eux.

‘Si la concurrence peut engendrer la réussite financière et sociale, la coopération est la clé de notre survie. Toutes les espèces coopèrent pour survivre.’

Dans l’intérêt de notre survie, nous devons reconnaître que nos propres vies sont également un réseau de dépendances mutuelles. Nous devons trouver un terrain d’entente. Les générations doivent résoudre leurs différences. Les barrières linguistiques doivent être contournées. Nous devons cesser de nous regarder à travers les filtres de la culture, de la race et du sexe et nous considérer comme des partenaires. Nous sommes confrontés à l’extinction, et nous ne pouvons l’éviter que si nous travaillons ensemble pour protéger notre environnement dans sa totalité.

Conserver et créer et non consommer

Regardez autour de vous. Combien de vos possessions sont liées à des souvenirs ? Combien sont des trésors transmis par votre famille, des cadeaux qui vous rappellent ceux qui les ont offerts, de vieux objets familiers que vous utilisez depuis de nombreuses années, des articles ménagers et des décorations que vous ou vos proches avez créés ? Et combien ont été achetés avec l’idée qu’ils devraient être remplacés dans quelques années ?

‘Nous achetons des produits provenant d’industries qui les conçoivent pour qu’ils tombent rapidement en morceaux, transformant nos précieuses ressources naturelles en déchets.’

Autrefois, les femmes léguaient leurs robes à leurs enfants et à leurs domestiques. Aujourd’hui, nous remplissons les terrains d’enfouissement de vêtements à la mode de l’année dernière. Pensez au gaspillage, de la récolte à la fabrication et à l’expédition, de vêtements qui étaient autrefois faits pour durer cent ans. Nous en sommes venus à croire que la plupart de nos possessions ont une durée de vie limitée. Nous achetons des produits provenant d’industries qui les conçoivent pour qu’ils tombent rapidement en morceaux et qui font ensuite pression pour nous empêcher de réparer les articles cassés. Nous transformons nos précieuses ressources naturelles en déchets.

Agir par altruisme et non par intérêt personnel

Les droits de l’individu sont-ils plus importants que la protection de la société ? La réalisation de bénéfices donne-t-elle aux entreprises le droit d’exploiter les travailleurs ? L’inconfort d’un masque donne-t-il à un individu le droit d’exposer les autres à un virus mortel ? Il est clair que la clé de notre survie n’est pas l’intérêt personnel. C’est l’altruisme.

‘Le mutualisme est la clé de la survie, mais dans notre tentative de contrôler les formes de vie gênantes, nous sommes devenus anti-vie.’

L’intérêt personnel s’étend à notre famille et à nos amis, avec pour corollaire que le reste peut être exploité, négligé et détruit. Les personnes, les animaux domestiques, la faune, les insectes, les mauvaises herbes, les microbes sont sacrifiés pour soutenir notre commodité, nos préjugés et notre culture mercantile. Nos ancêtres utilisaient du bicarbonate de soude et du vinaigre pour nettoyer leurs maisons ; nous choisissons des produits pour leurs bienfaits antibactériens. Les jardiniers avaient l’habitude de cultiver leur sol pour protéger leurs plantes des maladies et des insectes.

Aujourd’hui, nous empoisonnons le sol avec des herbicides et des pesticides. Les insectes pollinisent nos jardins. Les mauvaises herbes nourrissent les insectes, ont des propriétés curatives et peuvent être des ajouts délicieux aux salades et aux ragoûts. Les bactéries digèrent nos aliments et alimentent notre corps. Les champignons sont le sang de la forêt. Pourquoi empoisonnons-nous notre planète pour nous débarrasser d’organismes qui sont essentiels au maintien de la vie ?

‘Pourquoi empoisonnons-nous notre planète pour nous débarrasser d’organismes qui sont essentiels au maintien de la vie ?’

Le mutualisme est la clé de la survie dans le monde naturel. Mais nous avons fait des parasites, des mauvaises herbes et des microbes nos ennemis. Dans notre tentative de contrôler les formes de vie gênantes, nous sommes devenus anti-vie.

Demain, le Quebec

Malheureusement, tout en essayant de promouvoir les groupes environnementaux au Québec, le Concours David Suzuki a également fait la promotion des caractéristiques humaines qui nous mènent sur la voie de l’extinction : la compétitivité, l’acquisition et l’intérêt personnel. Nous avons tous été conditionnés à croire que la compétition mène au succès et que le succès se mesure par la popularité et l’argent et nous ne pouvons pas nous libérer de ce paradigme. Nous ne pouvons pas reprocher aux organisateurs du concours Suzuki de faire ce que nous faisons tous, d’une manière ou d’une autre, sur la base des hypothèses inconscientes qui contrôlent notre comportement.

Nous agissons en fonction d’un paradigme non examiné. Et nous devons changer ce paradigme.

Image d’entête : Caleb Oquendo – Pexels

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Carole Reed - WestmountMag.caCarole Reed a passé son enfance à Pointe Claire à grimper aux arbres, à jouer dans les bois et à faire du vélo dans les champs. Elle est devenue écologiste en 1972 après avoir lu Silent Spring. Aujourd’hui retraitée de l’enseignement, elle consacre le reste de sa vie à sauver la planète pour son arrière-petite-fille.



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