La véritable valeur de l’environnement
Il faut considérer la valeur écologique lorsque nous équilibrons les coûts et le rendement
Par Georges R. Dupras
Précédemment publié dans WestmountMag.ca
Chaque maillon d’une longue chaîne de réglementations régissant la production et la livraison du bitume* représente un passif environnemental important. Tous les maillons dans cette longue chaîne demandent leur part des profits, à un coût minime pour chaque lien. L’homme est à la base de cette réalité. Et malheureusement l’homme confond souvent le besoin et l’avidité.
Le pragmatisme versus l’idéalisme
Un véritable pragmatisme exigerait que nous équilibrions les coûts et le rendement. Cette équation devrait aller au-delà des valeurs économiques et inclure la valeur écologique. En réalité ceci n’est pas le cas, la raison étant que l’homme, en règle générale, est détaché de l’environnement naturel, et s’il n’est pas personnellement affecté par le changement, il se souciera peu en dehors des contraintes sociales.
Ce que nous savons versus ce que nous pensons savoir
On peut dire que la plupart d’entre nous n’avons qu’une compréhension élémentaire de l’économie, une compréhension qui va rarement au-delà de la façon dont elle nous affecte personnellement. Ce que nous comprenons encore moins, ce sont les environnements mêmes qui soutiennent toutes les formes de vies sur cette planète. Je fais référence ici aux environnements marins et terrestres que nous tenons pour acquis.
Chaque maillon d’une longue chaîne de réglementations régissant la production et la livraison du bitume représente un passif environnemental important.
Il existe un décalage entre la plupart des sociétés et l’environnement naturel. Combien de fois avons-nous entendu les intérêts ruraux dire que les citadins ne savent pas d’où provient leur nourriture? Si tel est le cas, cette même observation ne peut-elle pas être dite de la méconnaissance de l’environnement naturel par l’homme?
La résilience versus la fragilité
Citons ici les mots du docteur Lynn Rogers concernant la relation entre l’homme et les ours, « Le problème pour les ours n’est pas tellement ce que nous ne savons pas, mais plutôt ce que nous pensons savoir qui n’est aucunement vérifiable ». Cette même déclaration s’applique à propos de nos connaissances des mêmes environnements qui supportent toutes les formes de vie sur cette planète.
Des études démontrent que si une seule composante ou espèce est retirée d’une région, l’écologie, y compris la topologie de cette région, change. Je fais référence aux recherches sur les loups (Yellowstone) et les cougars (Californie, Oregon, Washington) dans l’ouest des États-Unis. Malgré des études examinées par des pairs sur les effets de l’exploitation, nous abordons toujours devant-derrière les questions environnementales controversées. Nous réagissons à des situations plutôt que de nous concentrer sur la prévention dès le début.
Les coûts reliés à la santé
Les préoccupations environnementales sont une priorité faible** quand les méga-projets sont envisagés. Les profits et les emplois, dans cet ordre, sont d’une importance primordiale et particulière. Le problème est que personne ne sait comment valoriser l’air pur, l’eau pure, une bonne santé, ou les innombrables autres avantages naturels que nous prenons pour acquis ou dont nous ne sommes pas conscients. Prenons par exemple le silence lorsque nous marchons dans les bois. Les avantages d’un environnement sain sont incontestables. Pensons aux médicaments qui proviennent des composés issus d’essences florales.
‘…l’homme, en règle générale, est détaché de l’environnement naturel, et s’il n’est pas personnellement affecté par le changement, il se souciera peu en dehors des contraintes sociales.’
Notre vie quotidienne et nos relations familiales sont constamment menacées par des contraintes de notre propre conception. Les résultats de ces angoisses donnent souvent lieu à de la violence, et mènent à l’alcoolisme, aux drogues illicites, aux ruptures familiales, et mènent trop souvent aux suicide. Pourtant, les valeurs du capitalisme sont prééminentes dans nos cultures. L’économie passe avant les considérations sociales, et le matérialisme avant tout.
Nous professons une chose, et prenons ensuite une part active à l’affaiblissement de cette même affirmation. Plusieurs d’entre nous apportons un soutien tacite aux arguments reconnaissant le changement climatique, mais nous sommes moins préoccupés par la montée des eaux à Venise ou par les tentatives d’éliminer les bisons canadiens dans l’intérêt de pâturages pour le bétail. L’exploitation aurifère industrielle pose de graves problèmes en raison de l’utilisation de mercure. Nous sommes moins préoccupés par les petites exploitations minières qui nourrissent les familles que par les méga-projets qui enrichissent les plus fortunés (peut-être parce qu’elles ne sont pas inscrites à aucune bourse).
Les terres et les voies navigables sont gravement endommagées par les eaux de ruissellement provenant des activités minières, agricoles et autres. La récente fuite de bitume au Venezuela est un exemple des intérêts des plus riches qui ignorent les besoins des moins fortunés.
Pourquoi répéter des évidences ?
Je répète souvent ces évidences. Pourquoi ? Parce que, contrairement à ce qu’on nous a toujours appris au secondaire sur l’importance d’étudier l’histoire, nous continuons toujours à répéter nos erreurs.
‘Malgré notre obsession de la croissance économique, la vie continuera sans aucun doute, et indépendamment de la perte d’espèces, les humains s’adapteront comme ils l’ont toujours fait.’
Pour l’instant, cette évidence nous convient. Notre devise est la croissance économique à tout prix. Nous nous sentons à l’aise, et nous avons été conditionnés à croire que tout autre formule est inconcevable. Je vous avoue que nous vivons dans un monde de doubles. À quelques exceptions près, nous possédons tout en double, sauf l’environnement qui nous supporte. Malgré notre obsession de la croissance économique, la vie continuera sans aucun doute, et indépendamment de la perte d’espèces, les humains s’adapteront comme ils l’ont toujours fait.
Il serait cependant intéressant de savoir comment l’épitaphe de l’homme se lira, ceci après avoir annihilé toutes les autres formes de vie tout en se présentant comme humain et attentionné.
* Mélange visqueux d’hydrocarbures provenant de la distillation du pétrole (dilbit).
** Dans certains pays en développement, les questions d’environnement et de sécurité ne sont pas prises en compte.
Image d’entête : ARLIS Reference via StockPholio.net
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Georges R. Dupras se fait le champion et le défenseur des animaux depuis plus de 50 ans. Il est le représentant du Québec de Zoocheck Canada, et un ancien directeur de la Société canadienne pour la prévention de la cruauté envers les animaux (CSPCA). En 1966, il s’est impliqué dans la campagne initiale pour sauver les phoques qui a mené à la fondation de l’International Fund for Animal Welfare (IFAW) en 1969. Il a publié deux livres : Values in Conflict et Ethics, A Human Condition. Georges demeure à Montréal, Québec, Canada.
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