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Non au dépotoir radioactif
de Chalk River

Une menace de pollution radioactive future de nos eaux

Par Carole Reed

16 avril 2025

Le jour où CANDU est devenu « NO CAN DO », c’est le 29 juin 2011, quand le gouvernement Harper a vendu la division CANDU d’Énergie atomique du Canada à SNC Lavalin pour 15 millions de dollars. L’influence croissante du secteur privé sur une industrie qui devrait être soumise à des contrôles gouvernementaux stricts laisse envisager à la forte possibilité que l’une des plus grandes rivières du Canada soit déjà polluée par des déchets radioactifs et qu’elle le devienne encore plus à l’avenir.

Aujourd’hui, le laboratoire de Chalk River appartient aux Laboratoires nucléaires canadiens (LNC), une filiale d’Énergie atomique du Canada limitée (EACL), et est exploité sous contrat par l’Alliance canadienne pour l’énergie nationale (CNEA), un consortium du secteur privé dirigé par AtkinsRéalis (anciennement SNC Lavalin) en partenariat avec deux entreprises américaines, Jacobs et Fluor.

Perplexe ? Moi aussi, mais j’ai pris le temps de comprendre.

L’Alliance nationale canadienne de l’énergie fonctionne selon le modèle « entreprise de l’état exploitée par un entrepreneur (EEEE) ». Le public canadien reste propriétaire des terrains fédéraux d’EACL, y compris des réacteurs arrêtés et des déchets radioactifs. Et c’est l’argent de nos impôts qui finance l’EEEE.

En février 2024, le consortium Atkins Réalis a obtenu un permis de la Commission canadienne de sûreté nucléaire pour construire une installation de gestion des déchets en surface pour stocker les déchets faiblement radioactifs près du site de Chalk River.

Énergie atomique du Canada a signé un contrat avec le consortium Atkins Réalis pour gérer les déchets de son réacteur National Research Universal (NRU) usé à Chalk River. En février 2024, le consortium Atkins Réalis a obtenu un permis de la Commission canadienne de sûreté nucléaire pour construire une installation de gestion des déchets en surface pour stocker les déchets faiblement radioactifs près du site de Chalk River.

Ce que nous ne pouvons pas faire, c’est autoriser la construction d’un dépôt de déchets nucléaires à Chalk River, sur le site du défunt réacteur nucléaire NRU. Pour comprendre ma profonde inquiétude face à ce projet, il faut connaître un peu l’histoire de Chalk River.

En 1944, les laboratoires de Chalk River ont été construits sur la rive de la rivière des Outaouais afin que l’eau de la rivière puisse être utilisée comme liquide de refroidissement et comme modérateur de neutrons pour notre premier réacteur atomique, le NRX.

En 1952, la société Énergie atomique du Canada limitée a été créée pour promouvoir l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. Malgré ses bonnes intentions, EACL a fourni au ministère américain de l’Énergie, de 1955 à 1985, du plutonium sous forme de combustible usé provenant de l’installation de Chalk River et destiné à la fabrication d’armes nucléaires.

À la fin des années 50, les réacteurs CANDU ont été développés pour produire de l’électricité et du cobalt 60 pour des applications médicales et industrielles.

Bien entendu, l’industrie n’a pas été exempte d’accidents. Malgré toutes les mesures de sécurité mises en place, des défaillances mécaniques et des erreurs humaines peuvent se produire, et se sont produites.

En 1952, le NRX a fondu lorsque des barres de contrôle ont été accidentellement retirées du cœur et que les barres de combustible ont surchauffé. En 1958, une rupture de combustible et un incendie dans le bâtiment du réacteur NRU ont entraîné une contamination radioactive de l’ensemble du bâtiment et d’une vaste zone à l’extérieur du bâtiment.

Les deux incidents ont fait l’objet d’un nettoyage approfondi par des civils travaillant avec les militaires. Une partie du nettoyage a consisté à acheminer les déchets radioactifs vers une zone sablonneuse située à une certaine distance de la rivière des Outaouais. À l’époque, notre connaissance des eaux souterraines et des systèmes fluviaux était très limitée !

‘Cette installation sera également utilisé pour stocker les déchets faiblement radioactifs provenant d’autres sites canadiens, mais aussi importés des États-Unis et d’autres pays.’

Certains militaires ayant participé au nettoyage ont signalé des problèmes de santé ultérieurs. Selon la Commission canadienne de sûreté nucléaire, « le suivi de la santé de ces travailleurs n’a pas révélé d’effets néfastes à la suite des deux accidents ». Cependant, le Regroupement pour la surveillance du nucléaire note que certains militaires affectés au nettoyage du bâtiment du réacteur NRU ont demandé une pension d’invalidité militaire en raison de leur état de santé déficient : leur demande a été rejetée.

En 2007, le réacteur NRU vieillissant a dû être réparé. Pour effectuer ces réparations, la présidente et première dirigeante de la CCSN, Linda Keen, a mis le réacteur à l’arrêt. Mais le gouvernement Harper, s’appuyant sur l’avis d’experts indépendants, a adopté une loi d’urgence pour redémarrer le réacteur, par souci de « sécurité des citoyens qui ont besoin d’une médecine nucléaire essentielle ». Il est possible qu’il se soit également préoccupé de la perte de chiffre d’affaires, mais ce n’est là qu’une spéculation de ma part. Linda Keen sera plus tard démise de ses fonctions pour avoir ignoré la décision du Parlement de redémarrer le réacteur.

En 2008, le NRU a laissé échapper environ 7 000 litres d’eau légère par jour, l’eau utilisée pour refroidir le réacteur qui est purifiée puis rejetée dans la rivière des Outaouais. Puis, le 5 décembre 2008, de l’eau lourde contenant du tritium s’est échappée du réacteur NRU.

Le réacteur a été arrêté pour la dernière fois le 31 mars 2018 et est entré dans un « état de stockage » avant de pouvoir être entièrement déclassé, un processus qui prend de nombreuses années. Énergie atomique du Canada a confié au consortium Atkins Réalis la construction d’une installation de stockage en surface pour contenir les déchets de son réacteur désormais hors service. Cette installation sera également utilisé pour stocker les déchets faiblement radioactifs provenant d’autres sites canadiens, mais aussi importés des États-Unis et d’autres pays.

L’approbation de la construction d’un site d’élimination des déchets à environ un kilomètre de la rivière des Outaouais reposait sur la promesse que seuls les déchets faiblement radioactifs seraient acceptés. Mais, comme le rapporte la journaliste Natasha Bulowski, «d’anciens employés de l’industrie nucléaire et des experts mettent en garde contre le fait que certains déchets destinés à être éliminés contiennent des niveaux inacceptables de matières radioactives à longue durée de vie ».

Le consortium a obtenu son permis de construire en 2024, malgré les graves préoccupations en matière de sécurité et d’environnement soulevées par les Concerned Citizens of Renfrew County, où se trouve la décharge, et par les Anishinaabe qui vivent dans la région. La CCSN a rejeté un rapport qui lui avait été soumis en avril 2022 par le Ralliement contre la pollution radioactive qui démontrait que le projet n’était pas conforme aux normes de sécurité de l’Agence internationale de l’énergie atomique.

‘… les déchets radioactifs ne sont pas confinés de manière sûre. L’installation de stockage est situé dans un système fluvial qui alimente la rivière des Outaouais, source d’eau potable pour 140 municipalités, dont Ottawa et Montréal.’

En bref, les déchets radioactifs ne sont pas confinés de manière sûre. L’installation de stockage est situé dans un système fluvial qui alimente la rivière des Outaouais, source d’eau potable pour 140 municipalités, dont Ottawa et Montréal. La structure elle-même n’est pas sous la surface, comme le suggère l’expression « en surface », mais se profilera en fait jusqu’à à cinq étages au-dessus du sol, dans une zone qui, avec le début du changement climatique, est devenue une zone de tornades.

Une plainte concernant la sécurité de la structure déposée par Concerned Citizens of Renfrew County, le Ralliement contre la pollution radioactive et le Regroupement pour la surveillance du nucléaire a été entendue les 19 et 20 novembre 2024 par la Cour fédérale du Canada. Ce recours n’a malheureusement pas abouti. Jeremy Barretto, avocat des Laboratoires nucléaires canadiens, a soutenu que « les requérants, à notre avis, ne se sont pas acquittés du fardeau qui leur incombait de démontrer que la décision [d’autoriser le NSDF] comportait de graves lacunes ou des failles fondamentales ».

Ceci nous amène au présent.

En février et en mars de cette année, la Première nation Kebaowek a gagné deux procès contre le projet en invoquant une violation de ses droits en vertu de la déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et des menaces pour l’habitat d’au moins 26 espèces en péril dans le milieu environnant.

Grâce à leurs efforts, les Kebaowek et les groupes de citoyens qui luttent à leurs côtés ont obtenu pour les Canadiens un sursis jusqu’en septembre 2026. Si nous nous unissons, nous pouvons empêcher la constructionde ce dépotoir de déchets radioactifs à Chalk River et nous pouvons empêcher la création d’un dangereux précédent pour la pollution radioactive future de nos précieuses eaux canadiennes. Nous pouvons dire « NO CAN DO! » à Énergie atomique du Canada limitée.

Pour que les Canadiens soient protégés contre les effets graves sur la santé et l’environnement, les déchets de faible activité doivent être stockés sous terre dans des systèmes de confinement étanches et résistants aux tremblements de terre, et les déchets de moyenne et de haute activité doivent être stockés dans des sites géologiques profonds et stables, tels que des mines abandonnées.

‘Je demande instamment à la CCSN de déplacer le dépôt de déchets nucléaires de Chalk River dans un endroit sûr, loin des lacs et des rivières, loin des zones sismiques et des tornades, et de construire en conformité avec les normes internationales de sûreté nucléaire.’

En tant que présidente de la Coalition Verte, je demande instamment à la CCSN de déplacer le dépôt de déchets nucléaires de Chalk River dans un endroit sûr, loin des lacs et des rivières, loin des zones sismiques et des tornades, et de construire en conformité avec les normes internationales de sûreté nucléaire.

Si vous êtes d’accord avec moi, faites part de vos préoccupations à votre candidat local et demandez-lui ce que son parti fera pour garantir le déplacement et la construction en toute sécurité de la décharge de déchets nucléaires dont la construction est actuellement autorisée à Chalk River.

Pour en savoir plus sur le projet, vous trouverez une mine d’informations sur le site web de la nation Kebaowek. Vous pouvez également faire une petite excursion virtuelle à Chalk River avec deux gars déterminés à voir de leurs propres yeux ce qui s’y passe.

Image d’entête: détail de Hear the Calling de Susan Nimbley

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Carole Reed - WestmountMag.caCarole Reed a passé son enfance à Pointe Claire à grimper aux arbres, à jouer dans les bois et à faire du vélo dans les champs. Elle est devenue écologiste en 1972 après avoir lu Silent Spring. Aujourd’hui retraitée de l’enseignement, elle consacre le reste de sa vie à sauver la planète pour son arrière-petite-fille.



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