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Conversations du Manden
au théatre La Chapelle

Djata, un voyage au cœur de l’épopée mandingue et des rythmes ancestraux

Par Sophie Jama

27 septembre 2025

Djata : Conversations du Manden a été présenté du 22 au 26 septembre 2025 au théâtre La Chapelle à Montréal. Cette œuvre interdisciplinaire dirigée par Aly Keita s’inspire de l’épopée mandingue transmise oralement par les anciens, les griots et les poètes, et mêle danse, chant, performance, musique et art sonore pour évoquer la filiation, la transmission et la résistance. Tradition orale, danses et musiques rituelles, récit mythique, c’est tout cela qui inspire l’artiste originaire de Guinée.

Danseur, musicien, acrobate, créateur et directeur de la compagnie Kira Arts, Keita se consacre aussi au dialogue et à la médiation culturelle. C’est dire qu’il est un artiste multidisciplinaire et qu’il a à cœur de partager sa culture d’origine dans l’échange avec un public qui en est le plus souvent ignorant.

Tradition orale, danses et musiques rituelles, récit mythique, c’est tout cela qui inspire l’artiste originaire de Guinée.

Deux chasseurs arrivent à la cour d’un roi pour que naisse son héritier. L’enfant qui viendra au monde sera malheureusement incapable de marcher mais trouvera finalement la force de se lever pour rassembler les peuples de l’Afrique de l’Ouest. Pour illustrer ce récit aux multiples rebondissements mais sans que ne soit révélé le récit, quatre danseurs (deux femmes et deux hommes) et un musicien hypnotisent le public pendant 45 minutes.

Sur fond d’installation qui sert de décor et évoque l’Afrique par ses nombreux instruments de musique, dans de très beaux costumes traditionnels, un couple de danseurs entre en scène au son d’une flute traversière envoutante qui semble raconter une histoire. Le musicien, le griot peut-être, conserve sa longue robe traditionnelle tandis que les danseurs échangeront leurs costumes flamboyants pour des tenues contemporaines.

Leurs danses – au son de la flute et de diverses percussions – sont très rythmées. Chaque partie de leurs corps suit le rythme effréné de la musique, des phalanges de leurs doigts jusqu’à leurs pieds en passant par leurs bras et leurs épaules qui les font ressembler à des oiseaux prenant leur envol. Les deux premiers danseurs s’accroupissent sur le sol à la recherche de quelque chose de dissimulé dans la terre mais qu’ils ne trouvent pas. Peut-être quelque coquillage pour fabriquer des bijoux du genre de ceux dont ils sont déjà parés.

‘C’est un ballet très codifié, avec duos et danses coordonnées à quatre, qui se déploie sous nos yeux.’

Un autre couple entre en scène, une femme qui danse et chante sur la musique, et un homme – l’enfant sans doute – qui rampe sur le sol sans pouvoir se lever. Mais le danseur, dans une sorte de transe, finit par se mettre sur ses deux pieds et même à presque voler dans les airs dans de puissantes acrobaties très maitrisées. Vers la fin du spectacle, un des danseurs, sorte de feuillu, entrera en scène revêtu d’un masque africain qui fait penser à un être de l’au-delà.

C’est un ballet très codifié, avec duos et danses coordonnées à quatre, qui se déploie sous nos yeux et au son de divers instruments : flutes, cora, percussions… Même le corps sert de percussions agrémentées de claquements de langues. L’ensemble est très réussi, sous de beaux éclairages, très rythmé, très généreux aussi : À la fin du spectacle, les artistes invitent ceux du public qui le désirent à venir danser avec eux pour une petite rallonge du spectacle sympathique et amicale.

Dommage qu’on n’ait pas eu, en voix off peut-être ou en surtitres, le récit complet de ce mythe qui sous-tend le ballet. Cela aurait permis aux spectateurs d’apprécier aussi la dimension narrative de tout ce déploiement musical et dansé, très réussi d’un point de vue esthétique, mais qui malheureusement reste mystérieux et loin de toute compréhension.

Djata : Conversations du Manden

Direction artistique, chorégraphie et musique originale : Aly Keita
Direction de production : Raffaela Siniscalchi
Direction technique et éclairages : Sharon Di Genova
Conseil stylistique et costumes : Raffaela Siniscalchi

Interprètes :
Fodé Bamba Camara (danse)
Krystina Dejean (danse)
Aly Keita (chant et danse)
Komty (chant et danse)
Lasso Sanou (musique live, multi-instrumentaliste)

Image d’entête : courtoisie de Djata

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Sophie Jama - WestmountMag.ca

Sophie Jama est titulaire d’un doctorat en anthropologie et d’une maîtrise en littérature comparée. Elle a publié plusieurs ouvrages au Québec et en France. Depuis une quinzaine d’années, elle couvre la scène culturelle montréalaise en matière de théâtre, de danse, de cirque et autres arts vivants.



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