Blonde Atomique : dans le Berlin d’avant la chute du mur
Un autre incontournable de l’été au grand écran
Par Luc Archambault
Blonde Atomique, la version française de Atomic Blonde – on sent que les traducteurs se sont creusé la tête longuement avant d’en arriver à cette traduction – est un film de David Leitch, au long passé de cascadeur, qui a réalisé John Wick (2014) et est en train de fignoler la suite de Deadpool. Cette Blonde atomique met en vedette Charlize Theron (qui s’illustre aussi à titre de productrice), James McAvoy, John Goodman, Sofia Boutella. Fait à noter : ce film est basé sur la BD (graphic novel) The Coldest City, créée par Anthony Johnston en 2012. Une autre preuve que la machine à idée originale de Hollywood est en train de s’encrasser.
N’empêche, ce film ne manque pas de souffle. En dépit de certaines longueurs, les séquences d’action impliquant une Charlize Theron qui a insisté pour réaliser toutes ses cascades elle-même sont digne d’une anthologie. Et la reconstruction d’un Berlin d’avant la chute du mur, tant du côté ouest que de son pôle inverse à l’est, est tout simplement époustouflant. Ayant séjourné à Berlin, j’en ai presque retrouvé mon accent local.
L’histoire? Juste avant la chute du mur, un agent du MI6 est assassiné par un agent du KGB afin de s’emparer de la liste de toutes les taupes de l’ouest actives en Union soviétique. Lorraine Broughton (Charlize Theron) est dépêchée à Berlin afin de récupérer la liste et assassiner un agent double à la solde de Moscou. Elle sera aidée à Berlin par David Percival (James McAvoy), un agent du MI6 qu’elle soupçonnera d’être Satchel, l’agent double, et par Delphine Lasalle, une espionne française (Sofia Boutella), avec laquelle quelques enlacements amoureux seront portés à l’écran.
S’en suivent des poursuites en série, toutes plus rocambolesques les unes que les autres, mais aussi fort intelligentes : la scène des parapluies dans une rue de Berlin avec une foule qui vient protéger Lorraine et ses complices est une belle surprise. Au fil des revirements de situation, on apprend, à notre grande surprise, la véritable identité de Satchel, et dans la scène finale on découvre un troisième niveau de traîtrise et la révélation de l’identité des manipulateurs ultimes des ficelles de cette histoire viendra clore ce petit bijou de film qui fait déjà pâlir bien des James Bond décolorés.
Combinée à la richesse de la reconstitution visuelle du Berlin de l’époque, la trame musicale des années 80 vient insuffler à ce film une coloration supplémentaire, même s’il s’agit surtout de remixage. Certains diront, avec raison, que cette bande sonore ne va pas assez loin côté alternatif, voire underground, pour décrire le climat oppressant normalement associé à cette ville divisée en deux camps opposés. Mais quant à moi, la majorité des pièces m’ont fait revivre ces années un peu naïves juste avant la tombée du mur. La nouvelle génération de cinéphiles qui découvrira cette réalité à la fois visuelle et musicale n’en ressortira pas déçue de cette plongée dans le passé trouble du monde bipolaire d’antan.
Et que dire de l’implication de Charlize Theron, de son jeu, de ses cascades ? Elle a eu vent de la BD The Coldest City dès 2010, lorsque sa compagnie de production a reçu le manuscrit non-publié de cette œuvre. Elle s’est immédiatement plongée dans cet univers et a initié le développement du scénario. Et afin d’exécuter de façon crédible toutes les cascades du film, elle a fait appel à pas moins de huit entraîneurs pour l’aider à s’entrainer pendant des mois. Je dois dire que le résultat crève littéralement l’écran.
Je n’avance pas que ce film réinvente le genre, mais en cette ère de héros fatigués à la James Bond ou Jason Bourne, aux clichés qui défilent et qui amoindrissent le spectaculaire ou qui le portent à un paroxysme défiant toute logique, comme dans la série Mission Impossible, l’arrivée d’un personnage féminin tel qu’interprété par Charlize Theron introduit un vent de fraîcheur et d’originalité qui, espérons-le, nous apportera quelques suites au grand écran, en autant que le scénario ne soit pas trop débridé et qu’il ne s’emballe pas dans l’hyper-violence gratuite ou dans des effets spéciaux exorbitants.
Images : courtoisie de Universal Pictures
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Luc Archambault
Écrivain et journaliste, globe-trotter invétéré, passionné de cinéma, de musique, de littérature et de danse contemporaine, il revient s’installer dans la métropole pour y poursuivre sa quête de sens au niveau artistique.
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