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Pupo, œuvre gestuelle
de Sofia Nappi

Un voyage chorégraphique inspiré de l’histoire de Pinocchio

Par Sophie Jama

13 novembre 2025

Enfant, la chorégraphe italienne de danse contemporaine, Sofia Nappi, a bien sûr été bercée par Les Aventures de Pinocchio, le célèbre conte de Carlo Collodi. Cette marionnette de bois, obligée de bien se comporter pour devenir un vrai petit garçon, avait aussi pour elle des aspects inquiétants. Car ce n’est pas facile de grandir dans le monde des adultes, et ça ne va pas sans quelques maladresses, parfois des réussites, mais aussi beaucoup d’échecs.

Pupo fait passer le spectateur par toutes les émotions liées à l’enfance, sa joie spontanée, son émerveillement face au monde, mais aussi ses craintes et ses chagrins.

Inspirée par deux immenses chorégraphes contemporains, Ohad Naharin, avec sa technique Gaga, et Hofesh Shechter (qu’on a pu admirer dans Theatre of Dreams, sur la scène de Danse Danse), Sofia Nappi déploie son propre talent artistique à travers sept artistes (quatre hommes et trois femmes) qui improvisent les traits de leurs personnages, mais qui réalisent aussi de superbes danses synchronisées.

Pupo, jusqu'au 15 novembre 2025 à la Cinquième Salle de la Place des Arts à Montréal

Image : Jeanette Bak

Pupo signifie à la fois « marionnette » et « enfant » en italien. L’œuvre construite en autant de morceaux musicaux que de chapitres d’un livre offre des chorégraphies où chacun des protagonistes explore les moindres parties de son corps, les découvre avec curiosité, expérimente leurs mouvements possibles, échoue dans cette entreprise et recommence… Les chorégraphies offrent également des rencontres avec les autres, les liens qui se tissent et se défont dans des duos ou de très belles danses collectives.

‘Pinocchio invite le spectateur à risquer la solitude pour grandir aussi.’

Les morceaux musicaux sont bien choisis de manière presque cinématographique. Des musiques folkloriques légères qui évoquent l’enfance à un nocturne de Chopin émouvant, en passant par Yaron Engler Irfan ou Dead Combo, Nappi fait passer le spectateur par toutes les émotions liées à l’enfance, sa joie spontanée, son émerveillement face au monde, mais aussi ses craintes et ses chagrins.

Pupo, jusqu'au 15 novembre 2025 à la Cinquième Salle de la Place des Arts à Montréal - Image : Valerio Baranović

Image : Valerio Baranović

Et ce sont toutes les parties du corps des artistes qui sont mises à contribution. Comme font les enfants, les danseurs découvrent avec surprise les mouvements des phalanges de leurs doigts. Leurs bras et leurs jambes leur semblent trop longs et parfois difficiles à maîtriser. Le ballet est extrêmement physique et les artistes, comme les enfants, sont infatigables. On entend leurs respirations fortes dans les ralentis ou de très beaux tableaux en clair-obscur qui s’immobilisent pour un temps.

Les beaux costumes amples évoquent aussi l’enfance; les vêtements empruntés aux adultes, qui leur servent de déguisements, comme au théâtre de la Commedia dell’arte. Et les éclairages suggèrent des moments de solitude à travers des grillages ou l’invention de compagnons grâce aux ombres projetées.

‘Un voyage intérieur, où chacun retrouve l’élan tendre du pantin prêt à devenir soi-même.’

Les pantins de bois se métamorphosent peu à peu, apprenant de leurs explorations et de leurs échecs. Ils revêtent parfois un masque qui représente la personne, à savoir l’apparence par laquelle on se présente à la vision des autres. Car les pantins doivent aussi apprendre à composer pour grandir et s’intégrer au monde qui les entoure.

Le ballet Pupo invite le spectateur à ne jamais oublier notre enfant intérieur, impulsif et joueur, ni notre irrépressible envie de danser — rappelant au public le désir universel d’authenticité et de transformation continue.

Pupo, de Sofia Nappi

Concept et chorégraphie : Sofia Nappi
Assistant chorégraphe : Adriano Popolo Rubbio
Conception sonore : Ed Mars et Sofia Nappi
Conception éclairage : Alessandro Caso
Costumes : Judith Adam
Production : Komoco, Sosta Palmizi

Coproduction Burghof Lörrach (Allemagne), Danse Danse, ecotopia dance productions (Allemagne), Escher Theater (Luxembourg),  MART Foundation (États-Unis), ROXY Ulm (Allemagne), Sosta Palmizi (Italie), Tanz Köln (Allemagne), Theater Winterthur (Suisse), Tollhaus Karlsruhe (Allemagne).

Interprètes
Bonni Bogya
Evan Bescond
Glenda Gheller
India Guanzini
Paolo Piancastelli
Senne Reus
Sem Houmes

Pupo, jusqu’au 15 novembre 2025 à la Cinquième Salle de la Place des Arts à Montréal

Image d’entête : Thomas Schermer

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Sophie Jama - WestmountMag.ca

Sophie Jama est titulaire d’un doctorat en anthropologie et d’une maîtrise en littérature comparée. Elle a publié plusieurs ouvrages au Québec et en France. Depuis une quinzaine d’années, elle couvre la scène culturelle montréalaise en théâtre, en danse, en cirque et autres arts vivants.



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