Répit et espoir dans
le sillon d’un rasoir

Le Défi têtes rasées de Leucan a 15 ans et pour souligner cet anniversaire, l’organisation vise à enfiler une brochette de records pour alléger encore un peu plus le fardeau du cancer.

Par Caroline Arbour

Chaque année, quelque 300 familles québécoises reçoivent une nouvelle foudroyante : le cancer s’attaque à un des leurs, un enfant. Le choc se marie nécessairement à un sentiment d’incompréhension.

« On pense qu’un enfant ça doit jouer dans le parc et non dans une salle de jeu dans un hôpital, » dit Camille Rioux, agente de développement philanthropique pour Leucan. « Puis, toute la notion de la mort, on n’est pas censé envisager cela avant un âge avancé. »

Le combat, qui peut être long et récurrent, n’épargne aucun membre de la famille et c’est pour mieux affronter cette épreuve que des parents, désireux de s’épauler, ont fondé l’organisation il y a 37 ans. Mais, celle-ci n’avait pas les moyens de ses ambitions jusqu’à ce qu’un commerçant de Granby se donne la mission de faire affluer les dons afin que Leucan puisse offrir des services adaptés adéquats.

« J’ai vu des gens qui étaient très, très proches de moi et dont l’enfant est décédé de cancer, » expliquait Serge Tremblay plus tôt cette année dans le cadre de sa nomination pour le concours Gens de cœur Radio-Canada et Manuvie, qu’il a gagné. « Moi, je ne veux pas les oublier et tous les jours j’essaie de penser à eux. » Il avait en tête de les aider en 2001, mais comment? En se la faisant raser, cette tête!

Une vague déferlante

Serge Tremblay a convaincu des amis de passer eux aussi à la tondeuse et en trois semaines, au terme de leur campagne de sensibilisation et de mobilisation en Montérégie, ils ont remis un chèque de 11 000 $ à Leucan.

L’initiative a fait boule de neige et est devenue le Défi têtes rasées. En 15 ans, près de 80 000 Québécois ont posé le geste de mettre leur coco à nu pour amasser des millions de dollars, mais aussi pour être solidaires des petits patients qui voient leurs cheveux tomber au fil des traitements de chimiothérapie. Des duos père-fils, mère-fille, des familles entières, des groupes d’amis, des collègues de travail, des enfants aussi jeunes que 7 ans. Certains se sont calés dans la chaise des coiffeurs chargés de l’opération ou on fait le Défi à la maison à plus d’une reprise. Au moins une personne s’est prêtée à l’exercice 15 années de suite.

Récemment, « une adolescente nous a dit avoir participé pour montrer que ce qui est essentiel dans la vie c’est vraiment la force de l’individu et non le paraître, » rapporte Camille Rioux. Une noble vision qui ne pousse pas forcément tous ceux qui la partagent à sacrifier leurs jolies mèches cependant. Du moins, pas spontanément. Rioux a beau travailler pour Leucan, elle ne se sent toujours pas prête. D’ailleurs, moins de femmes prennent part au Défi. « Pour certains, ça exige peut-être une période de réflexion. Je pense à ma belle-sœur, cela faisait cinq ans qu’elle y songeait. Sa mère a vécu un cancer. Elle a décidé que là, c’était cette année. »

Un record Guinness… et plus

défi têtes raséesElle a bien choisi l’année pour se rallier à la cause car Leucan souhaitait établir une série de records (records.tetesrasees.com/fr/) au cours de cette 15e édition du Défi. L’organisation attend toujours la confirmation, mais avec le nombre de têtes rasées en quatre heures le 24 mai dernier, 1 000 Québécois auraient déjà fait tomber un record du monde Guinness. Et comme il reste un peu plus de deux semaines avant la fin de l’événement, d’autres sommets peuvent encore être atteints, dont celui de franchir la barre des cinq millions de dollars de dons — une somme qui représente près de la moitié des revenus annuels de Leucan.

L’argent recueilli sert à fournir un éventail de services aux membres, à vie, dès le diagnostic, dont l’accompagnement individualisé avec des travailleurs sociaux, le massage thérapeutique et des programmes récréatifs comme le camp estival qui permet à 120 familles de s’éclater pendant une semaine, en nature, alors qu’une équipe médicale assure le suivi des enfants sur place.

Si les deux tiers des fonds sont consacrés à ces mesures de soutien, 14 % sont versés directement aux familles pour leur permettre de souffler financièrement. L’aide profite entre autres à celles qui habitent en région éloignée et qui doivent se rendre à Québec ou à Montréal pour des traitements. Camille Rioux dit que ce « gros coup de main » est hautement apprécié. « Si un parent perd son emploi, il sent qu’il peut se concentrer plus sur son enfant et moins se soucier de l’aspect financier. »

Le reste va à la recherche sur les cancers pédiatriques dont les plus fréquents sont la leucémie, puis ceux du cerveau, du système nerveux et des lymphomes. Depuis une vingtaine d’années, il n’y a pas plus ni moins de cas de cancer chez les enfants, mais grâce aux avancées scientifiques un plus grand nombre de jeunes patients réussissent aujourd’hui à vaincre la maladie. Le taux de survie est passé de 71 % à environ 82 %, ce qui laisse espérer qu’un jour quelqu’un quelque part découvrira comment l’enrayer complètement.

Un défi tout près, le 17 septembre au centre commercial Alexis Nihon

Le centre commercial Alexis Nihon sera l’hôte du Défi têtes rasées pour la première fois le 17 septembre prochain, entre 12 h et 15 h, au niveau métro. Ce sera l’avant-dernière activité de rasage de l’édition 2015. Un don minimal de 50 $ est requis pour y participer et il est recommandé de s’inscrire en ligne au tetesrasees.com. Alexis Nihon est détenu et géré par le Fonds de placement immobilier Cominar, qui a joué un rôle clé dans l’organisation et la tenue de plusieurs éditions du Défi têtes rasées Leucan à Québec. La compagnie continue de soutenir la cause et encourage ses employés à s’impliquer dans l’événement.

Images : Thibault Carron



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